Ce soir-là, il a décidé de rencontrer l’Autre, celui ou celle qui l’écrit. Il a quelques comptes à régler avec lui ou elle. Il entraîne le public dans sa quête. En cours de route, il se confie à lui. Il lui raconte son vécu, son histoire, ses ressentis, ses émotions de personnage… Il lui arrive de poser un regard critique, caustique, sur le monde qui tourne à contre-sens.
De saynète en saynète, il entraîne les spectateurs dans l’espace-temps mystérieux des imaginaires, imaginaires qui sont bel et bien une réalité, sa réalité à lui, réalité de personnage. Tout cela est drôle. Enfin, pas toujours. Gorge et cœur peuvent se serrer. Les dents aussi.
Intention de mise en scène par Marcel Bozonnet
« On trouvera dans La vie, des fois, les liens obscures entre l’ivresse, la transgression, le sacré et le divin. On trouvera de la fraicheur, des agressions et, à la fin, des amours tragiques. Dans La vie, des fois, un unique rôle vivant, interprété par une comédienne. En quelque sorte, une individue, le "Je" de l’autrice.
Le Personnage mêle l’aveu et la critique, les poses et la sincérité, le dandysme et le grotesque. Une tonalité parfois enchantée, parfois dérisoire. Le Personnage a des arrêts brusques, des interruptions de vie, des intervalles. Comme des cicatrices. Le jeu glisse sans cesse du naturel à l’artificiel : "au théâtre, il ne faut pas imiter la vie."
Le Personnage refuse le phénomène de l’aliénation propre à l’homme : sa dépendance aux autres, à la sociabilité. Dans le cas de l’acteur, sa dépendance aux spectateurs. Le Personnage, en poète, accepte son introduction dans le champ coupable du désir et du langage.
On explorera les tonalités de l’œuvre, notamment la tonalité tragique avec les thèmes de la souffrance et de l’amour. Le premier, l’impossible amour. Ici, un mannequin, peut-être l’opposé infini de la mère. En tout cas, un « faux semblable », un être sans être : le mannequin séduit le client, pour lui vendre non son corps mais ces nippes.
Dans le cas présent, le mannequin a une âme. Elle appelle le client, notre " Personnage". Le Personnage en est débordé par sa pulsion - cette force motrice au dedans même de nos corps. Convulsive.
On comprend à la fin de la représentation que l’amour fou du vide a tellement fait souffrir Le Personnage qu’il vient de s'offrir à nous en sacrifice.
Alors Le Personnage ?
Je pense à ce qu’écrivait Mandelstam en 1920 : « Un homme amorphe, sans forme, un individu inorganisé est le plus grand ennemi de la société. »
Et pour conclure, une précision pour l’interprète : l’Epon est le nom d’une organisation grecque antifasciste. De sorte qu’on appelait ces partisans grecs, combattants dévoués et impétueux : les éponistes. D’où il découle que l’éponisterie est un corps à corps impétueux. »