Intention...
Il s’agira de crise.
De la crise du dollar à celle du logement, de la crise de l’empire romain à la crise du Moyen-Orient, nous voguons de crise en crise, essayant vaguement de tenir le cap à la recherche d’un rivage stable qui nous échappe souvent, pour ne pas dire toujours.
Et il s’agira d’une femme.
Difficile dès lors, d’échapper au cliché, au déjà trop vu et triste constat : très souvent, les femmes ne parlent que de problèmes de femmes.
Mais il s’agira de Pauline, et alors tout change.
Car Pauline n’est pas en crise mais jouera une femme en crise, (crise de la quarantaine ? crise d’amour trahi ? d’amour déçu ? de bovarysme mal digéré ? crise de petite bourgeoise, ou bien tout ça et plus encore, car c’est sans fin ?), et telle une ethnologue s’aventurera dans la « terra incognita » de la douleur avec objectivité et légèreté, libre de choisir le rôle de femme à jouer au gré de ses désirs et pulsions, entre l’extravagance farfelue d’un Almodovar et la sensibilité exacerbée d’un Cassavetes.
Mais on est au théâtre.
Il y aura donc une Comédienne qui jouera Pauline Couic qui jouera elle-même une « Femme en crise ».
Et les questions de la « Femme » rebondiront sur Pauline et inévitablement sur la Comédienne, dans un jeu gigogne où chacune d’elles se perdra pour se retrouver dans la peau de l’autre, pour ne pas se retrouver comme avant, pour ne pas se retrouver du tout, perdues dans le labyrinthe de nos possibles, cherchant à saisir un monde de plus en plus illisible et, en définitive, questionnant tout.
Tout, y compris le style de jeu car est-ce que Pauline sera toujours Pauline avec ou sans nez rouge ? Reste-t-on exactement la même clownesse si l’on change d’habit ? À qui va s’adresser cette question, à la Comédienne, à Pauline ou à la Femme indécise devant ce corsage acheté dans une compulsion névrotique ?
Paola Rizza
Pauline Couic : mon double sauvage, clownesse,forme primitive de l’acteur génitrice organique.
Sa devise : fiasco, débâcle, marasme…
Est-ce que le malheur des autres fait rire ?
À la façon d’un rat de laboratoire, Pauline tenterait, dans un décor entre sitcom et salon bourgeois (mise en situation, maison témoin), de mettre en place un contexte propice à la crise : crise de nerfs, crise existentielle, crise identitaire, crise de la quarantaine (j’en passe et des meilleures)…
L’idée, c’est d’être dans un intérieur, un intérieur domestique, un endroit où peut-être trop de femmes ont grandi, ont évolué, se sont ennuyées... et s’ennuient encore…
Cette femme «sexy», sortie d’un film de David Lynch, bourgeoise, apprêtée, aime les gens qui vont mal, ils sont pour elle plus intéressants, plus inspirants, plus beaux…
Ces héroïnes qui souffrent, telles Gena Rowlands dans Une femme sous influence ou Romy Schneider dans L’important c’est d’aimer, lui donnent envie d’en être.Elle se passionne pour le jeu, pour le drame, et pourtant elle porte un nez rouge, ce tout petit masque, cet appendice...
Comment est-ce possible encore aujourd’hui de porter un nez ? Ce nez rouge, si lourd héritage, est-il possible pour cette clownesse de s’en affranchir, de faire autrement ?
Pauline aime les mélancoliques et les dépressifs, ils sont écorchés vifs, et ça, ça plaît, elle le sait...
Alors comment aller mal ?
Pauline (qui au départ est un sujet plutôt équilibré et stable, c’est elle qui le dit), va tenter de s’approprier différentes névroses : alcools, drogues, boulimies, addictions, fond de mélancolie et de nostalgie, en espérant convoquer l’état dépressif et sublimer les déséquilibres qui l’accompagnent…
Comment entrer en dépression ?
Telle est la question!
La souffrance n’est-elle pas davantage jubilatoire que le bien-être ?
La clownesse sait des choses que l’actrice ne sait pas.
La dialectique : Socrate revendique et applique à plusieurs reprises (dans les dialogues de Platon) ce qu’il appelle l’art d’«accoucher les âmes » (méthode aussi appelée maïeutique). Cette méthode consiste en un interrogatoire, mené par Socrate, qui progresse logiquement de façon à faire « accoucher » l’interlocuteur d’une connaissance qu’il possédait en lui sans s’en rendre compte (travail d’interrogatoire pratiqué régulièrement par les clowns).
Je suis votre sujet, je suis l’objet de votre sujet.
Le mot "bovarysme", initié par Jules de Gaultier en 1892, est passé dans la langue courante pour désigner
Une insatisfaction maladive à l'égard des choses du réel due à une tendance excessive au rêve et à l'idéalisation.