Présentation du spectacle par Mathilde Delahaye
DOCUMENTS
Ce travail est basé sur des propos tenus lors d’écoutes d’appels anonymes à une ligne de prévention du suicide. Ces voix disent à une oreille bénévole ce qu’elles ne peuvent dire nulle part ailleurs. A travers les confidences, les récits de vie, les hallucinations, les rêves, à travers les silences, les bégaiements, les tremblements et le choix des mots: on entend l’universalité de ces « folies » ordinaires, les inquiétudes profondes qu’elles révèlent, celles que notre présent génère et dont nous sommes tous ou presque victimes, mais que certains ne tolèrent pas ou plus. C’est une mise en forme musicale et une écoute politique que je voudrais proposer.
PARTITION MUSICALE
Je voudrais travailler cette matière sonore comme une partition musicale, une polyphonie à plusieurs dizaines de voix anonymes, pour trois acteurs. Ici le travail de montage s’apparentera davantage à la fabrication d’une partition pour laquelle les acteurs seront les instrumentistes. Echos, éclats, variations, contrastes, silences, tempo, canons, refrains et ritournelles… il s’agira d’une écriture musicale.
Aux trois acteurs pourraient, dans un second temps de recherche, s’ajouter des musiciens pour transformer cematériau sonore en base de composition à une oeuvre pour quatuor à cordes et trio d’acteurs.
L’INTIME EST POLITIQUE
Dans ces paroles il y a en creux une critique adressée à notre présent. Les malheureux, les mal-adaptés, les « fous » , les épuisés… en veulent au monde. En dénonçant, rarement frontalement, leur inadéquation à notre époque, c’est sa brutalité qu’ils accusent, ses manquements. Ils nous pousse à le penser autrement. Il y a le désir de « changer la vie » dans le geste du désespoir. C’est cela que je veux faire entendre. L’écho de ces intimités à notre inquiétude collective et la tension révolutionnaire qu’elles induisent.